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Michel Barnier, le conciliateur : un Premier ministre au service de la négociation et de l’unité

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Michel Barnier, le conciliateur : un Premier ministre au service de la négociation et de l’unité

Michel Barnier, le médiateur

Le nouveau Premier ministre est connu pour sa capacité à trouver des compromis et à éviter les conflits. Ses contacts à Bruxelles seront bénéfiques pour la France et malgré ses 73 ans, il saura éviter les pièges politiques. Il devra cependant rester en poste plus d'un mois pour pouvoir réellement faire avancer les choses.

Écrit par Elsa FREYSSENET, Gabriel GRÉSILLON et Derek PERROTTE

Michel Barnier, originaire de Savoie, met en avant sa patience et sa persévérance en tant que marcheur en montagne. À l'âge de 73 ans, il accède à Matignon, marquant ainsi une nouvelle étape dans la carrière d'un homme ambitieux mais discret. Après une compétition intense entre plusieurs candidats, il parvient à faire un retour remarqué sur la scène politique française, qu'il avait délaissée pendant un certain temps.

Il y a quelques jours, l'ancien député LR François Cornut-Gentille se souvenait de lui car son nom n'était plus mentionné, ce qui l'a fait sourire. Il semble avoir laissé les autres candidats prendre de l'avance. Cela pourrait être interprété comme de la ruse de sa part, mais dans cette période tumultueuse, cela semble un peu exagéré. Cependant, Michel Barnier a un avantage important aux yeux du Président : en tant qu'ancien commissaire européen, il est bien connu et respecté à Bruxelles, où il est considéré comme persévérant, intègre et fiable. Sa voix pourrait être précieuse alors que la Commission européenne vient de lancer une procédure de déficit excessif contre la France.

Expert en négociation

Cet homme élancé et imposant, vêtu d'un costume élégant mais rigide, est connu sous le surnom de « Monsieur Brexit » à Bruxelles. Sa carrière a largement été consacrée aux affaires européennes, notamment en tant que commissaire à la Politique régionale (1999-2004) puis au Marché intérieur et aux Services de 2010 à 2014. Il a mené une lutte contre les excès de la finance et la City de Londres dès cette époque.

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Son acharnement et son talent pour construire des coalitions au Parlement européen portent leurs fruits. Même s'il n'est pas le plus sociable et enjoué, Michel Barnier n'est pas du genre à distribuer des tapes dans le dos, selon un ancien collaborateur qui souligne sa sobriété : il boit très peu d'alcool, fait du sport tous les jours et dort régulièrement. Sa maîtrise de l'art de la négociation, si rare en France, s'harmonise parfaitement avec les pratiques européennes.

C'est dans ce contexte que Jean-Claude Juncker a demandé à Michel Barnier, en 2016, de diriger les négociations pour l'Union européenne face aux Britanniques qui ont décidé de quitter l'Union. C'est ironique car Michel Barnier avait voté pour l'élargissement de l'Europe à 4 nouveaux membres, dont le Royaume-Uni, lorsqu'il avait 21 ans en 1972.

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Il accepte tout de suite, convaincu que l'avenir de l'Union européenne est en jeu, et motivé par les provocations de Nigel Farage qui menace de la détruire. Sa détermination sera son principal atout dans cette lutte prolongée. Malgré les changements politiques en Grande-Bretagne, il reste présent, avec son équipe restreinte et sa devise "Keep calm and negotiate". Accrochée au mur de son bureau se trouve une photo de De Gaulle et Adenauer se serrant la main, un geste qui l'a inspiré à s'engager en politique à l'âge de 14 ans, lorsqu'il était lycéen à Albertville.

Michel Barnier a été choisi comme le principal négociateur de l'Union européenne dans les pourparlers avec le Royaume-Uni sur le Brexit, et il a montré qu'il était capable d'unir les vingt-sept membres de l'UE.

La méthode de Barnier implique une visite rapide dans les 27 capitales européennes pour établir des lignes directrices communes. Il assure une transparence totale dans les négociations et défend avec force l'unité européenne contre les tentatives de division des Britanniques. Il fait preuve d'une patience infatigable en expliquant en détail aux journalistes divers aspects, tout en étant pointilleux mais respectueux. Sa relation avec Emmanuel Macron est caractérisée par une communication régulière, franche et sans désaccord majeur. Tous deux partisans d'une plus grande souveraineté européenne, ils sont parfaitement en phase.

Un accord a été obtenu et son défi relevé avec succès : la méthode Barnier a uni les 27 pays autour de la protection de leur marché commun, considéré comme leur plus grand atout. "Je suis un homme politique, pas un technocrate", se vante-t-il, content de sa capacité à trouver des terrains d'entente. Cette compétence lui sera précieuse à Matignon. "Je sais rassembler des individus différents autour d'une même table, chercher un compromis sans blesser personne," répète-t-il à son retour en France.

À l'âge de 73 ans, il n'a plus rien à craindre

Un confident de Michel Barnier

À 73 ans, il n'a plus rien à perdre

Est-il conscient qu'il pourrait être nommé Premier ministre pour une période assez courte, se terminant dès le début de la session parlementaire le 1er octobre ? Un proche affirme que oui, car à l'âge de 73 ans, il n'a plus grand-chose à perdre. Pour lui, la politique est sa vie et arrêter de la pratiquer reviendrait à mourir. De plus, si son mandat dure plus longtemps que prévu, cela pourrait avoir un impact sur la scène politique en France.

Le parti de gauche a déjà déclaré qu'il déposerait une motion de censure, tandis que le Rassemblement National reste incertain, en mettant l'accent sur les questions liées à l'immigration. Michel Barnier, qui manque de charisme et n'est pas très doué en communication, ne pourra pas, en trois semaines, mobiliser l'opinion publique contre les autres partis pour avoir une chance de voir son mandat prolongé.

Son âge comme avantage

Dans cette situation particulière, son âge est cependant un avantage paradoxal. À l'approche de ses 77 ans en 2027, tous les potentiels candidats à la présidentielle peuvent se rendre compte qu'il ne sera pas un concurrent. Cela se voit dans la réaction rapide et chaleureuse d'Edouard Philippe : "Nous serons nombreux à le soutenir". De même, le chef des députés de la Droite républicaine, Laurent Wauquiez, vante "un homme de grande qualité". Il peut également prévoir que ni le RN ni la gauche ne souhaitent élaborer un budget restrictif pour 2025, qu'ils le laisseront jouer ce rôle désagréable et qu'il saura en tirer profit. Sa phrase favorite, que ce soit à Bruxelles ou à Paris, est "Pas de sectarisme".

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Le parti de droite se montre satisfait de la nomination de Michel Barnier et souhaite influencer les prochaines décisions.

Il est doué pour choisir les bonnes personnes pour l'entourer et n'hésite pas à reconnaître les compétences d'un conseiller plus brillant que lui s'il peut aider à progresser dans les dossiers. Il est persévérant, très organisé, exigeant envers ses collaborateurs, mais pas manipulateur et fidèle (qualités rares en politique aujourd'hui).

Pendant longtemps, il a mentionné que son idéal en matière de politicien était Jacques Chaban-Delmas, qui a été Premier ministre sous la présidence de Pompidou pendant deux ans. Chaban-Delmas était connu pour son style de vie élégant et festif, ce qui le différait complètement de Michel Barnier, qui n'est pas du tout un homme de société.

"Je me sens mal à l'aise lorsqu'on me demande de raconter des anecdotes ou de divertir les autres. Ma vision de la politique ne se limite pas à cela. J'apprécie réunir les individus pour travailler ensemble à la construction."

Vengeance contre Macron

La nomination de Michel Barnier par Emmanuel Macron semble être motivée par une certaine revanche. En 2019, Michel Barnier était prêt à diriger la liste Renaissance aux élections européennes et il aspirait à devenir le candidat de la France pour la présidence de la Commission européenne. Cependant, à ce moment-là, l'Elysée avait choisi d'attribuer la présidence de la BCE à Christine Lagarde. De plus, les membres du parti au pouvoir n'avaient pas jugé Michel Barnier assez en phase avec leur vision du "Nouveau Monde".

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Les moments marquants d'une crise sans précédent

Avec un nouveau contexte et de nouveaux besoins, sa maturité et son sérieux – il donne l'impression d'être un enseignant lorsqu'il parle – peuvent apaiser les Français qui privilégient l'ordre à la confusion. Cependant, cela décevra ceux qui ont voté pour un changement de politique, représentant les deux tiers des électeurs.

Il est souvent oublié que Michel Barnier a été le plus jeune conseiller général de France à l'âge de 22 ans en 1973, le plus jeune député en 1978 et le plus jeune président d'un département.

L'exploit réalisé par Chirac

C'est en tant que responsable de la Savoie qu'il s'est fait remarquer du grand public en obtenant l'organisation des Jeux Olympiques pour Albertville en 1992. En tant que membre du RPR, il avait demandé à François Mitterrand de soutenir cette candidature. Le Président socialiste avait accepté avec plaisir car l'attribution des JO d'hiver à Albertville avait compromis la candidature de Paris pour les JO d'été. A cette époque, le maire de Paris était Jacques Chirac. Depuis cet événement, Chirac avait surnommé Michel Barnier "le moniteur de ski".

Il est difficile de prédire quelle direction politique il prendra. Après s'être décrit comme libéral et pro-européen pendant longtemps, il a commencé à exprimer des critiques envers l'Union européenne suite au Brexit. Il a souligné que l'ultralibéralisme a été une erreur fondamentale de l'Europe, en soulignant que la vision naïve selon laquelle les échanges commerciaux allaient résoudre tous les problèmes était spécifique à l'Europe. Ces propos ont été tenus lors de sa campagne pour la présidentielle de 2022 au sein des Républicains, où il devait tenir compte de l'opinion des membres du parti.

Les politiciens doivent avoir une vision à long terme.

Influencé par les valeurs sociales catholiques de sa mère, il n'a pas eu peur de suggérer un moratoire sur l'immigration et de remettre en question les décisions de la Cour européenne des droits de l'homme. Même si sa candidature n'a pas abouti, cette campagne a mis en lumière sa capacité à être flexible sur les valeurs.

Michel Barnier, surnommé "le montagnard", a une citation qui lui tient à cœur concernant le rôle des politiciens : il doit avoir une vision globale et expliquer les avantages des changements. Avec sa taille imposante de 1,87 mètre, il a une perspective étendue. Cependant, il doit faire attention à ne pas paraître condescendant envers les Français.

Les noms mentionnés sont Elsa Freyssenet, Gabriel Grésillon et Derek Perrotte

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