L'Assemblée nationale a exprimé son désaccord à l'égard du gouvernement concernant la réforme de l'immigration. Les députés ont voté en faveur d'une motion de rejet du projet de loi, mettant ainsi fin aux discussions qui n'avaient pas encore commencé dans l'hémicycle du Palais-Bourbon. C'est une défaite humiliante pour le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, qui s'était fortement impliqué dans ce dossier.
Par Grégoire Poussielgue
Le projet de loi sur l'immigration a été stoppé, ce qui représente un échec politique pour Gérald Darmanin et une situation incertaine. Ce lundi, le gouvernement a manqué de quelques voix pour éviter une motion de rejet sur ce texte symbolique, dont l'étude avait commencé le jour même à l'Assemblée.
À 17h45, la présidente Yaël Braun-Pivet a annoncé le résultat du vote après près de deux heures de débats tendus. 270 députés ont voté en faveur de la motion présentée par le député écologiste Benjamin Lucas, tandis que 265 ont voté contre. Un grand cri de joie s'est immédiatement élevé des bancs de la gauche, des Républicains (LR) et du Rassemblement national (RN). Des appels à la démission de Darmanin ont été lancés depuis les rangs de l'ex-Nupes.
Ambiance tendue
Le gouvernement a perdu le vote. Malgré les efforts des trois groupes de la majorité – Renaissance, Modem et Horizons – soutenus par le groupe Liot, ils n'ont pas pu faire face à l'alliance inattendue des députés de gauche, du RN et de LR, surnommée la "carpe et le lapin" par Gérald Darmanin.
En ce qui concerne les chiffres, la quasi-totalité des députés du RN ont voté en faveur de cette motion, à l'exception d'un seul. De plus, 40 députés sur 62 des LR ont également voté pour, ainsi que la grande majorité des parlementaires de gauche. Du côté de la majorité, il a été constaté un manque de cinq votes chez Renaissance, trois chez le Modem et un chez Horizons.
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Durant toute l'après-midi, une ambiance très tendue a dominé au Palais-Bourbon. Le Rassemblement National et Les Républicains ont maintenu le suspense jusqu'au dernier moment concernant leur position sur la motion de rejet, avant de finalement s'y joindre.
Au début des discussions, Gérald Darmanin avait pourtant exprimé avec passion son soutien au débat, exhortant chaque partie à assumer ses responsabilités et critiquant au passage la collaboration de la gauche avec la droite. Il avait déclaré : "Il est inacceptable que la France soit le seul pays en Europe à refuser de débattre d'un sujet aussi crucial pour la souveraineté, l'humanité et l'avenir".
« Arnaque », « promesse mensongère »
Au fil de l'après-midi, il était de moins en moins douteux quel serait le sens du vote du RN. Le député RN Julien Odoul a fortement souligné l'arnaque que représentait ce projet de loi. En séance, la députée RN Edwige Diaz a déclaré que son groupe voterait en faveur de la motion. Peu après, Olivier Marleix, le chef des députés LR, a exprimé la même opinion, dénonçant la promesse mensongère de ce texte.
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Après le vote, Marine Le Pen exprimait ouvertement sa satisfaction. Elle a déclaré : "Nous sommes très heureux que cette résolution ait été adoptée". La gauche était également satisfaite. Mathilde Panot, la chef de file des députés LFI, s'est réjouie en déclarant : "Le gouvernement devrait se rappeler qu'il y a un Parlement dans ce pays et que le Parlement peut tout à fait voter contre". Olivier Marleix, son homologue chez les LR, s'est réjoui d'un "choix politique qui n'a rien à voir avec Gérald Darmanin".
"Défait de Darmanin"
Le ministre de l'Intérieur subit un revers important, après avoir déployé beaucoup d'efforts pour faire aboutir ce projet de loi qu'il soutient depuis un an. Malgré ses tentatives incessantes de séduire les députés du parti Les Républicains, il se heurte à la réalité : les parlementaires LR souhaitent rester un groupe d'opposition. Même s'ils restent divisés (deux députés ont voté contre la motion de rejet, onze se sont abstenus), ils l'ont clairement montré ce lundi. En conséquence, le ministre de l'Intérieur en sort fragilisé.
« Darmanin est désapprouvé. Il doit en tirer les enseignements. Il est nécessaire d'élaborer une loi respectant les principes républicains. Les étrangers ne doivent pas être considérés comme des personnes suspectes. Macron a été élu pour s'opposer au RN », a déclaré sur X (anciennement Twitter) Olivier Faure, le leader du Parti socialiste.
Il y a différentes possibilités
On ne sait pas encore ce qui va arriver au projet de loi sur l'immigration et, après une réunion d'urgence du groupe Renaissance, rien n'a été décidé lundi soir. Le gouvernement a plusieurs choix : il peut renvoyer le texte pour une deuxième lecture au Sénat ou à une commission mixte paritaire (CMP). Dans les deux cas, il devra se conformer aux conditions de LR, qui est majoritaire au Sénat avec les centristes et en CMP.
En rejetant la démission du ministre de l'Intérieur lundi soir, Emmanuel Macron a demandé à la Première ministre et au ministre de l'Intérieur de lui proposer des solutions pour surmonter ce blocage et parvenir à une loi efficace. Elisabeth Borne a réuni lundi soir les ministres concernés par le texte, les présidents de groupe de la majorité, le président de la Commission des lois, Sacha Houlié, et le rapporteur général du texte, Florent Boudié, afin de définir la stratégie.
Grégoire Poussielgue est l'auteur de
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