Emmanuel Macron se retrouve dans une situation délicate face aux risques de censure concernant son nouveau Premier ministre. Après plus de cinquante jours depuis la démission du gouvernement, le président n'a toujours pas pris de décision concernant cette nomination. La principale difficulté réside dans le fait que les personnalités envisagées doivent être immédiatement non censurables. Une nouvelle complication est apparue avec l'annonce d'Edouard Philippe, qui a officialisé sa candidature pour l'Elysée et n'exclut pas une élection présidentielle anticipée.
Écrit par Isabelle FICEK
La classe politique est sur le point de craquer, dans un pays où le gouvernement a démissionné il y a plus de cinquante jours, ce qui a créé une situation d'immobilité très préjudiciable. C'est ce qu'a constaté un membre de l'équipe gouvernementale sortante, qui se sent désabusé et surpris par la situation. Mercredi, une nouvelle journée de négociations politiques, d'incertitudes et de manœuvres politiques complexes a eu lieu, avec des tentatives de décrypter les positions et les intentions des différents partis politiques, qui sont eux-mêmes divisés par des objectifs parfois divergents.
Edouard Philippe, ancien Premier ministre, a annoncé officiellement sa candidature à l'élection présidentielle lors d'une interview au magazine "Le Point" mardi soir. Cette nouvelle n'est pas surprenante, mais le timing et le fait qu'il soit prêt à se présenter même en cas d'élection anticipée suggèrent qu'il pense qu'Emmanuel Macron n'aura pas d'autre choix que de démissionner pour sortir de la crise politique actuelle. Malgré les déclarations répétées du président de la République affirmant qu'il resterait en poste jusqu'en 2027, Jean-Luc Mélenchon, du parti La France Insoumise, a continué à promouvoir une pétition en ligne appelant à destituer Emmanuel Macron.
Le Rassemblement National, expert en double langage, est toujours au centre des discussions et des indécisions concernant la question de la "non-censurabilité", selon une source proche du président de la République. Emmanuel Macron a eu des conversations téléphoniques mardi avec les leaders de la droite, du PS, des écologistes et de Marine Le Pen, mais pas avec ceux de La France insoumise qui ont refusé. Il a poursuivi ces discussions mercredi, cherchant la personnalité qui serait le moins susceptible d'être immédiatement critiquée par tous.
C'est ici que le problème se pose. Le Rassemblement national, qui compte 126 députés nécessaires pour qu'une motion de censure soit adoptée, semble jouer avec tout le monde. Il veut être un faiseur de roi tout en étant ambigu. Va-t-il censurer ou non ? Un ministre sortant admet que quel que soit le futur Premier ministre, il dépend du Rassemblement national, même s'il n'est pas certain qu'il ait intérêt à déclencher une crise immédiatement et à être tenu pour responsable de l'instabilité.
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Cependant, selon les déclarations des membres du Rassemblement national, il est possible que Xavier Bertrand ou Bernard Cazeneuve soient censurés immédiatement. Les conditions énoncées par Marine Le Pen dans une interview avec « Le Parisien » – un Premier ministre qui traite le RN de manière respectueuse, qui s'engage à introduire la proportionnelle aux élections législatives, qui ne fait pas empirer les problèmes d'immigration et d'insécurité, et qui ne néglige pas les classes populaires et modestes dans son budget – sont-elles suffisantes pour éviter une censure immédiate ? Il y a une crainte généralisée de possibles manœuvres de diversion.
Les montagnes russes de la politique ne garantissent jamais un risque zéro. Le mercredi a été marqué par des rebondissements, notamment après une réunion du bureau national du PS où les opposants d'Olivier Faure n'ont pas réussi à faire passer leur amendement sur la non-censure a priori envers un gouvernement Cazeneuve. Cela a semblé renforcer la popularité de Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, aux yeux de certains membres du camp présidentiel qui ont souligné sa capacité à éviter la censure interne contrairement à Cazeneuve.
Cependant, du côté droit de l'échiquier politique, la prudence est de rigueur. Lors de leur conversation téléphonique avec Emmanuel Macron sur la candidature possible de Xavier Bertrand, Gérard Larcher, Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau souhaitaient que le président vérifie s'il ne serait pas rapidement censuré. Cependant, il est très difficile pour quiconque d'obtenir une garantie à 100% sur cette question cruciale. Le risque zéro n'existe pas, et même dans l'ancienne majorité, de nombreux membres estiment qu'Emmanuel Macron a déjà pris beaucoup trop de temps avant de prendre un risque. De nouveaux noms, comme celui de Michel Barnier, sont également apparus ou ont refait surface.
Une nomination prévue pour mercredi a été définitivement annulée en soirée. Les tests vont se poursuivre. Selon un ministre sortant, il est important de mettre en place des responsabilités au sein des partis politiques pour éviter une instabilité gouvernementale. Il reste à voir si les Français attribueront la responsabilité du chaos aux partis politiques ou au président et à sa décision de dissolution.
Isabelle Ficek
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