Le Rassemblement National fait face à des difficultés pour mettre en place des changements budgétaires. Malgré l'aggravation des déficits publics, le parti d'extrême droite tente de se rendre crédible en organisant son discours économique tout en restant fidèle à ses principes. La priorité demeure la lutte contre l'immigration dans leur programme politique.

Écrit par Jacques Paugam

Le Rassemblement National va-t-il être reconnu pour sa rigueur budgétaire ? Réunie à Bercy avec les autres groupes parlementaires, à l'exception des Républicains, ce jeudi, pour discuter des moyens de réaliser des économies après l'annonce d'un déficit record atteignant 5,5 % du PIB en 2023, l'extrême droite cherche à tirer profit de la crise des finances publiques pour améliorer son discours. Cependant, cela ne signifie pas qu'elle remet en question son programme économique. C'est un changement de cap pour un parti qui a longtemps ignoré les dépenses.

"Ce gouvernement a manipulé et falsifié les finances du pays. Jusqu'à présent, personne n'a suggéré des mesures d'économies sauf nous", déclare Jean-Philippe Tanguy, le représentant en économie du RN et le seul député présent lors de cette réunion.

« Apaiser pour mieux convaincre »

Cependant, critiquer l'exécutif ne suffit pas, il est également nécessaire de persuader les milieux économiques qui restent très réticents. Renaud Labaye, le secrétaire général du groupe RN à l'Assemblée nationale, reconnaît qu'en aspirant à des responsabilités, il est essentiel de dépasser une opposition simpliste. Le choix des mesures pour le futur programme présidentiel dépendrait désormais de leur impact financier. Cela représente un changement majeur au RN, qui se voit déjà aux portes du pouvoir.

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Comme pour le projet de "Frexit" défendu par Marine Le Pen en 2017, le parti essaie de donner l'impression de modifier régulièrement son programme. Parmi les changements mis en avant, il affirme ne plus soutenir la retraite à 60 ans que pour les travailleurs ayant commencé leur carrière très tôt. "Nous ajustons nos positions", admet Sébastien Chenu, député du RN et vice-président de l'Assemblée nationale. La réforme – bien qu'elle reste très coûteuse – consisterait finalement à exiger 40 ans de cotisations, avec un âge légal de départ fixé à 62 ans.

La dette publique, qui dépasse les 110% du Produit Intérieur Brut, suscite de plus en plus d'attention après que la cheffe de file des députés du Rassemblement National l'ait qualifiée de menace pour la souveraineté nationale dans une tribune récente dans les « Echos ». Il est impensable de laisser penser que la France puisse faire défaut, déclare Sébastien Chenu, résumant ainsi la stratégie du RN, qui vise à rassurer pour élargir sa base électorale de droite.

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Afin de normaliser les projets de loi, les députés ont reçu pour consigne lors de la réunion de groupe de se concentrer davantage sur l'aspect financier. Il est nécessaire de faire preuve de sérieux face au déficit en limitant les dépenses supplémentaires. Un cadre a souligné la nécessité de rationaliser et de trouver de nouvelles économies avant l'examen du prochain budget.

Afin de trouver des moyens d'action supplémentaires, le RN persiste à s'appuyer sur des mesures conventionnelles telles que la lutte contre la fraude sociale et fiscale, évaluée à 15 milliards d'euros, ainsi que la réforme du système administratif complexe.

L'immigration toujours

Il y a eu un changement de ton notable, du moins dans les paroles, qui est confronté au manque de connaissance économique d'un parti politique dont les nombreux revirements ont fini par semer la confusion autour de son programme. Jean-Philippe Tanguy s'irrite en affirmant que c'est incroyable que même lorsqu'il rencontre des grands dirigeants du CAC 40, ils lui demandent encore s'il est en faveur de la retraite à 60 ans. Il estime que le RN est injustement victime de "mystification".

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Malgré des discours responsables en apparence, l'extrême droite reste attachée à ses thèmes électoraux, notamment l'immigration qu'elle considère comme la principale source de dépenses. Jordan Bardella, le président du RN, insiste sur la nécessité de briser le tabou de l'immigration en tant que guichet social, en prônant la préférence nationale pour l'attribution des aides sociales, y compris pour le logement et en proposant la suppression de l'aide médicale d'Etat (AME). Selon lui, le coût de l'immigration s'élève entre 10 et 15 milliards d'euros par an, tandis que Marine Le Pen parle plutôt de 16 milliards.

En ce qui concerne l'impact du modèle social, le Rassemblement National ne souhaite pas perdre le soutien de ses électeurs après avoir axé sa campagne de 2022 sur des mesures visant à améliorer le pouvoir d'achat. Le parti continue de proposer une baisse de la TVA sur l'énergie à 5,5%, soutient une augmentation de 10% des salaires sans charges pour les employeurs et prévoit d'exonérer d'impôt sur le revenu tous les actifs de moins de 30 ans.

Le Rassemblement National votera également contre une réforme de l'assurance-chômage proposée par le Premier ministre, Gabriel Attal. Lors de son passage au Journal de 20 heures de TF1 mercredi soir, ce dernier a qualifié les promesses du RN de "mensonges".

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Jacques Paugam

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