En choisissant Michel Barnier comme Premier ministre, Emmanuel Macron opte pour un changement vers une politique plus conservatrice pour sortir de la crise actuelle. La gauche a critiqué cette nomination en la qualifiant de « vol » des résultats des élections législatives de l'été. Le Rassemblement National ne prévoit pas de voter une motion de censure pour le moment.
Écrit par Grégoire POUSSIELGUE
Emmanuel Macron était encore un bébé lorsque Michel Barnier, âgé de 73 ans, a commencé sa carrière politique. Il n'avait que quelques mois lorsque Michel Barnier a été élu député pour la première fois en mars 1978. Après les élections législatives et deux semaines de consultations intenses à l'Elysée, Emmanuel Macron a choisi un homme expérimenté, ayant occupé de nombreux postes politiques tels que député, sénateur, président de conseil général, ministre à plusieurs reprises et commissaire européen à deux reprises, pour remplacer Gabriel Attal à Matignon.
Après avoir nommé Gabriel Attal, le plus jeune Premier ministre, Emmanuel Macron a nommé le plus âgé. Le nouveau Premier ministre aura besoin de beaucoup d'expérience pour faire face à une Assemblée nationale divisée en trois blocs – le Nouveau Front populaire (NFP), le Rassemblement national (RN) et le bloc central – alors qu'il est membre du quatrième bloc, Les Républicains, qui ne compte que 47 députés.
Un nouveau gouvernement sera bientôt formé, et il sera basé sur l'idée de rassembler. L'Elysée a annoncé que ce gouvernement devra rapidement s'attaquer à des sujets importants, en commençant par finaliser le budget pour l'année 2025. L'arrivée de Michel Barnier à Matignon s'accompagne de promesses de changements et de réformes, afin de répondre aux défis et aux préoccupations des Français. Il s'est engagé à dire la vérité sur la dette, tant financière qu'écologique.
Emmanuel Macron a pris sa décision en se basant principalement sur la stabilité du gouvernement, ce qui semblait être la meilleure option. Malgré l'étude des candidatures de Xavier Bertrand, Bernard Cazeneuve et Thierry Beaudet pendant deux semaines, aucune solution parlementaire satisfaisante n'a pu être trouvée.
Selon l'Elysée, le fait que le Parti Socialiste ait refusé de soutenir Bernard Cazeneuve a influencé la décision d'Emmanuel Macron. Ne pouvant pas s'orienter vers la gauche, le Président a été contraint de se tourner vers la droite, explique-t-on au sein du Palais. Malgré les tentatives infructueuses depuis 2022 de former une alliance gouvernementale avec Les Républicains.
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Après avoir pris une décision inattendue de dissoudre le gouvernement après les élections européennes, Emmanuel Macron a finalement réussi à s'en sortir. Cependant, sa stabilité politique dépend désormais de l'attitude du Rassemblement National envers lui, car son maintien à Matignon est lié à cela, en collaboration avec Michel Barnier.
Le parti dirigé par Marine Le Pen et Jordan Bardella détient le pouvoir de faire adopter une motion de censure contre le gouvernement nouvellement nommé. Pour l'instant, ils ne prévoient pas de déposer immédiatement une motion de censure et refusent de voter pour celle que le NFP déposera lors de la reprise des travaux parlementaires.
Marine Le Pen et Jordan Bardella maintiennent le suspense quant à la suite des événements. Ils attendent de voir les actions concrètes de la politique générale, les arbitrages budgétaires et les initiatives prises par le gouvernement. Ils insistent sur l'importance de traiter les problèmes urgents des Français tels que le pouvoir d'achat, la sécurité et l'immigration. Ils se réservent le droit d'agir politiquement si ces questions ne sont pas abordées dans les prochaines semaines.
En 1982, il y avait un désaccord sur la dépénalisation de l'homosexualité. La nomination de Michel Barnier a été bien accueillie par Laurent Wauquiez, chef des députés de la Droite républicaine. Cependant, à gauche, il y a eu des réactions négatives car ils revendiquaient le poste de Premier ministre après avoir remporté les élections législatives mais sans obtenir une majorité. Jean-Luc Mélenchon de La France insoumise a déclaré que c'était une "élection volée", Olivier Faure du Parti socialiste a parlé d'une "crise de régime" et d'un "affront au front républicain", tandis que Marine Tondelier des Ecologistes a qualifié la situation de "scandaleux".
De nombreuses réactions, souvent très indignées, se sont propagées suite à l'annonce de manifestations prévues en France ce samedi pour protester contre les actions jugées autoritaires d'Emmanuel Macron.
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Selon la politologue Chloé Morin, les électeurs de gauche ont été appelés à bloquer le RN, mais ils se retrouvent maintenant avec un Premier ministre qui sera influencé par le RN. Le RN pourra exercer un réel pouvoir de veto sur les propositions de Michel Barnier. La personnalité de Michel Barnier, qui s'est opposé à la dépénalisation de l'homosexualité en 1982 et qui était en faveur d'une retraite à 65 ans avant la présidentielle de 2022, a suscité des réactions négatives à gauche.
« Michel Barnier représente également le sens de la responsabilité et une vision globale. Cependant, la question à se poser est : combien de soutien aura-t-il ? », déclare-t-on dans un département gouvernemental. En ce qui concerne l'Union européenne, Michel Barnier partage la même approche que le président de la République et a démontré sa compétence à trouver des compromis en tant que commissaire à Bruxelles et lors des négociations sur le Brexit.
La partie de la Macronie moins visible
François Hollande, élu député en juillet dernier, a réagi en disant qu'il ne pense pas que M. Barnier va apporter un changement vers une direction plus centriste. Au contraire, il pourrait se diriger vers une politique plus à droite que ce qui a été proposé jusqu'à présent. Michel Barnier, qui s'est positionné ces dernières années sur une ligne politique plus dure, est loin de représenter la "droite sociale" de Xavier Bertrand et encore plus éloigné de la gauche incarnée par Bernard Cazeneuve. En tant que candidat à la primaire de la droite pour l'élection présidentielle de 2022 (bien qu'éliminé au premier tour), il a défendu plusieurs mesures qui pourraient être associées au RN, telles qu'un moratoire sur l'immigration. Il est donc à voir s'il va changer de cap et se recentrer, lui qui se décrit comme un "gaulliste social".
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Parmi les membres de la majorité sortante, les réactions ont été variées. La faction de droite de l'ancienne majorité s'est réjouie de l'arrivée de Michel Barnier, approuvée par Horizons, le parti d'Edouard Philippe. En revanche, la faction de gauche s'est montrée plus réservée. Le parti Renaissance, tout comme le RN, souhaite évaluer la situation avant de prendre une décision. Dans un court communiqué, il a averti qu'il n'y aura pas de censure automatique mais qu'il exigera des explications détaillées avant de donner son soutien.
Après avoir quitté Matignon, Gabriel Attal pourra se concentrer sur son nouveau rôle de président du groupe Ensemble pour la République (EPR, ex-Renaissance) à l'Assemblée nationale. Comme Edouard Philippe, qui vient de se porter candidat à la présidentielle de 2027, Attal entretient des relations tendues avec Emmanuel Macron et souhaite plus que jamais retrouver son indépendance. Il a exprimé cette volonté de renouer avec les Français dans une vidéo diffusée pour marquer son départ de Matignon. En quittant Matignon, il a affirmé qu'il retrouvait sa liberté.
Grégoire Poussielgue
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