En choisissant Michel Barnier, Emmanuel Macron prend le risque de changer de cap vers la droite pour sortir de la crise. La gauche a critiqué la nomination du nouveau Premier ministre par Macron, estimant qu'il s'agit d'un détournement du résultat des élections législatives de l'été. Le Rassemblement National refuse pour le moment de voter une motion de censure.
Écrit par Grégoire POUSSIELGUE
Emmanuel Macron était encore très jeune lorsque Michel Barnier, âgé de 73 ans, a commencé sa carrière politique. En effet, il n'était encore qu'un bébé à la fin de l'année 1977, lorsque Michel Barnier a été élu pour la première fois député en mars 1978. Après les élections législatives et des consultations mouvementées à l'Elysée durant deux semaines, Emmanuel Macron a décidé de nommer un homme d'expérience pour remplacer Gabriel Attal à Matignon. Michel Barnier a une longue carrière politique, ayant été député, sénateur, président de conseil général, ministre à plusieurs reprises et commissaire européen à deux reprises.
Après avoir nommé Gabriel Attal, le plus jeune Premier ministre, Emmanuel Macron a choisi le plus âgé pour le poste. Le nouveau locataire de Matignon devra faire preuve d'une grande expérience pour évoluer dans une Assemblée nationale divisée en trois blocs – le Nouveau Front populaire (NFP), le Rassemblement national (RN) et le bloc central – alors qu'il fait partie du quatrième groupe, Les Républicains, qui ne compte que 47 députés.
Un nouveau gouvernement se met en place
Le gouvernement devrait être formé dans les prochains jours. L'Elysée a annoncé qu'il s'agirait d'un gouvernement visant à rassembler. Ce nouveau gouvernement devra rapidement se pencher sur des questions importantes, notamment la finalisation du budget pour l'année 2025, qui s'annonce déjà comme un sujet de débat houleux à l'Assemblée nationale. En prenant ses fonctions à Matignon, Michel Barnier a promis des changements significatifs tout en cherchant à répondre aux préoccupations et aux difficultés rencontrées par les Français. Il s'est également engagé à dire la vérité sur la dette financière et écologique.
La principale raison qui a influencé la décision d'Emmanuel Macron a été la nécessité d'avoir un gouvernement stable. Malgré l'étude de différentes options telles que Xavier Bertrand, Bernard Cazeneuve et Thierry Beaudet pendant deux semaines, aucune solution parlementaire viable n'a pu être trouvée.
Le fait que le Parti Socialiste ait refusé de soutenir Bernard Cazeneuve a été crucial dans la décision, affirme la présidence française. N'ayant pas la possibilité de s'allier avec la gauche, Emmanuel Macron a été contraint de se tourner vers la droite, selon les informations provenant de l'Elysée. Depuis 2022, des tentatives infructueuses avaient été faites pour former une alliance de gouvernement avec Les Républicains.
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Après la dissolution surprise au lendemain des élections européennes, Emmanuel Macron a finalement réussi à s'en sortir. Cependant, sa stabilité politique dépend désormais de l'attitude du Rassemblement National envers lui, puisque son maintien à Matignon est lié à cela et à la durée de cette stabilité incertaine.
Le parti dirigé par Marine Le Pen et Jordan Bardella détient le pouvoir de décider si une motion de censure contre le nouveau gouvernement sera adoptée. Pour l'instant, ils ne prévoient pas de déposer une motion de censure immédiatement et excluent de soutenir celle qui sera déposée par le NFP dès la reprise des activités parlementaires.
Marine Le Pen et Jordan Bardella maintiennent le suspense quant à la suite des événements. Ils vont évaluer le discours de politique générale, les décisions budgétaires et les actions du gouvernement. Ils insistent sur l'importance de résoudre les problèmes urgents des Français tels que le pouvoir d'achat, la sécurité et l'immigration. Ils se réservent le droit d'agir politiquement si ces questions ne sont pas traitées dans les semaines à venir, a déclaré Jordan Bardella, président du parti.
En 1982, l'opposition à la dépénalisation de l'homosexualité
La nomination de Michel Barnier a été applaudie par Laurent Wauquiez, chef des députés de la Droite républicaine, mais n'a pas été bien reçue à gauche. Après avoir remporté les élections législatives sans obtenir la majorité, la gauche revendiquait le poste de Premier ministre. Jean-Luc Mélenchon (LFI) a dénoncé une « élection truquée », Olivier Faure (PS) a parlé d'une « crise institutionnelle » et d'un manque de respect envers le front républicain, Marine Tondelier (Les Ecologistes) a qualifié la situation de « vrai scandale »…
De nombreuses réactions indignées ont été observées suite à l'annonce de manifestations prévues ce samedi en France pour protester contre les actions jugées autoritaires d'Emmanuel Macron.
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Les partisans de la gauche ont été appelés à s'unir contre le RN, mais finalement ils se retrouvent avec un Premier ministre qui sera sous l'influence du RN. Selon la politologue Chloé Morin, le RN aura un pouvoir de veto réel sur les propositions de Michel Barnier. La personnalité de Michel Barnier, qui s'est opposé à la dépénalisation de l'homosexualité en 1982 et soutient une retraite à 65 ans avant les élections présidentielles de 2022, a suscité des réactions vives à gauche.
Michel Barnier est considéré comme quelqu'un qui incarne le sens du devoir envers l'Etat et qui a une vision globale des choses. Cependant, on se demande combien de soutien il aura dans les décisions à prendre, selon les commentaires d'un ministère. En ce qui concerne l'Europe, Michel Barnier partage la même sensibilité que le président de la République et a montré un bon bilan dans sa capacité à trouver des compromis lorsqu'il était commissaire à Bruxelles et qu'il gérait les discussions sur le Brexit.
La faction de gauche de la Macronie se fait discrète
François Hollande, élu député en juillet dernier, a réagi en affirmant que l'alternance avec Michel Barnier n'est pas probable. Il a également souligné que tout changement pourrait être encore plus à droite que ce qui a été proposé jusqu'à présent. En effet, Michel Barnier, candidat à la primaire de la droite pour la présidentielle de 2022, a adopté une position politique plutôt dure ces dernières années, se rapprochant même des idées du Rassemblement National sur des sujets tels que l'immigration. Il se décrit pourtant comme un "gaulliste social", laissant planer le doute sur un possible recentrage de sa position politique.
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Parmi les membres de la majorité sortante, les réactions ont été variées. La faction de droite de l'ancienne majorité s'est réjouie de l'arrivée de Michel Barnier, salué par Horizons, le parti d'Edouard Philippe. En revanche, la faction de gauche s'est montrée plus réservée. Le parti Renaissance et le RN préfèrent attendre de voir les actions concrètes avant de se prononcer. Dans un court communiqué, le parti Renaissance a averti qu'il n'y aura pas de soutien automatique, mais qu'il demandera des explications détaillées avant de donner son accord.
Après son départ de Matignon, Gabriel Attal va maintenant se concentrer sur son nouveau rôle en tant que président du groupe Ensemble pour la République (EPR, anciennement Renaissance) à l'Assemblée nationale. Comme Edouard Philippe, qui vient de se porter candidat à la présidentielle de 2027, Attal entretient des relations complexes avec Emmanuel Macron et souhaite retrouver son indépendance. Il souhaite également renforcer son lien avec les Français, comme il l'a exprimé dans une vidéo diffusée pour marquer son départ de Matignon. Lors de son discours sur le perron de Matignon, il a souligné qu'il reprenait sa liberté.
Grégoire Poussielgue
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Le choix de Michel Barnier comme Premier ministre par Emmanuel Macron est vu comme une tentative de virage à droite pour sortir de la crise selon certains.
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